Le baume magique supposé tout guérir et notamment les Etats impécunieux se nomme « réforme ». Et le gouvernement semble vouloir en faire un usage accéléré.
Si les réformes sont dans la nature des choses, elles sont d’autant plus efficaces qu’elles s’accomplissent en continu. Croire qu’elles puissent tenir lieu de « grand soir » purifiant les Etats cigales de toutes leurs turpitudes pendant des décennies, est bien naïf.
La France, incapable de réduire ses déficits, incapable de stabiliser ses dépenses publiques, a besoin de claironner sa volonté réformatrice en tous domaines. Le Gouvernement semble d’ailleurs vouloir réformer tout ! Sauf ce qui est placé directement sous son autorité, c’est-à-dire l’Etat.
Or, c’est pourtant l’Etat, dans notre Pays, qui est à la source des problèmes les plus cruciaux ; il produit un droit truffé de normes infernales qui bloquent l’économie et l’emploi ; il engage des dépenses qu’il impute dans tous les comptes, sauf les siens ; il diffuse de l’incertitude, de l’anxiété,  et de la défiance.
Hélas, sa « réforMythe » frénétique accentue encore le risque de blocage du Pays. D’abord il existe un vrai danger à s’enivrer des réformes comme d’un « mythe ». La vie réelle n’a rien à voir avec ces croyances aveugles, de nature presque divine, consistant à ériger ce mot « réforme » en totem, à la manière des sociétés permissives invoquant les mânes célestes. Toutes les réformes ne sont pas bonnes ! Autant donc commencer par celles qui le sont.
Celles qui sont inspirées à la France par les institutions internationales comme l’OCDE, le FMI, la Banque mondiale, méritent au moins un examen critique préalable, afin d’éviter des erreurs d’appréciations manifestes déjà survenues.
Prenons l’exemple du 4ème opérateur téléphonique. Il était une préconisation forte de l’OCDE. La France, en élève docile a donc obtempéré. Aujourd’hui, elle ne sait plus qu’elle fusion inventer pour revenir à trois opérateurs, sans compter les milliers d’emplois détruits au passage.
Prenons maintenant l’exemple de la réforme territoriale. Ce qui fonctionne mal dans l’action publique, c’est l’Etat. Alors qu’envisage-t-on de réformer ? L’Etat ? Non ! Les collectivités locales ! Pourquoi ? Parce qu’elles sont supposées dispendieuses. Alors, observons les conseils généraux. Dépensent-ils trop ? Pour plus de 90%, c’est l’Etat qui décide de leurs dépenses. Puisque leurs dépenses augmentent, supprimons-les ! Bien que cela soit l’Etat qui décide de leurs dépenses. C’est à n’y rien comprendre, mais le rouleau compresseur de la soi-disant réforme territoriale avance. On change trois fois les modes de scrutin, trois fois la date des élections, on bouleverse les périmètres. Bref, au nom des bienfaits supposés de la réforMythe, on change tout, on complique tout, pour faire des économies dont il est déjà démontré qu’elles seront en fait des dépenses supplémentaires.
Prenons encore l’exemple de la réforme des professions réglementées. De quoi s’agit-il ? De transcrire dans notre droit national les recommandations des institutions internationales, comme cela avait été le cas pour le 4ème opérateur téléphonique. Nos professions sont-elles plus réglementées qu’ailleurs ? Nullement. Elles le sont moins qu’en Allemagne que l’Europe envie pour l’emploi, la croissance ou les finances. Le rapport de l’IGF stigmatise 37 professions du droit, de la médecine. Sans oublier les plombiers, les serruriers, les menuisiers dont personne n’avait jamais imaginé qu’ils constituaient un danger pour l’économie. Et naturellement les taxis pour être sûr d’étendre la caricature à tous.
Dans les deux cas, réforme territoriale, professions réglementées, mais il y aurait bien d’autres exemples, nous assistons par le Léviathan étatique à une mise en cause de tout ce qui fonctionne et qu’il faut absolument vite ponctionner pour renflouer les caisses vides de l’Etat. Dans le tourbillon de soi-disant réformes engagées, les projets déboucheront probablement sur une couche supplémentaire de complexité, sans améliorer, même dans le meilleur des cas, le fonctionnement de notre système public
Au final, dans l’immense difficulté dans laquelle s’enfonce la France, la tentation de la recentralisation des pouvoirs est sourdement mais puissamment à l’œuvre. Même si rien ne serait pire ! La France meurt d’ignorer les bienfaits de la proximité, de la subsidiarité, de la simplicité et de la responsabilité. Sous la surveillance gourmande des administrations centrales. Et le regard résigné du corps politique.