Ce qui traite de la LOLF m’intéresse, j’ai donc lu avec gourmandise l’article d’Acteurs Publics. Je reprends les sujets qu’il évoque dans le même ordre.

La LOLF n’a jamais fait des indicateurs de performance l’alpha et l’oméga de son but. Ce serait aussi stupide que d’accuser les constructeurs de commettre des excès de vitesse. Que les pilotes s’assument ! Cette LOLF visait une modernisation de l’action publique (sous-entendu une réforme de l’Etat) et une transparence financière que l’Ordonnance de 1959 ne permettait pas. Ce qui était tout de même fâcheux, notamment à la veille (au 1er janvier 2002) de partager, avec nos partenaires européens, la même monnaie, l’euro. Il s’agissait de transformer l’ancienne logique de « moyens » en logique de résultats. En fait, la logique de moyens reste profondément enracinée dans la culture publique française. Elle alimente toutes les promesses électorales. Pour faire prévaloir ensuite une logique de résultats et de pilotage par la performance n’est pas aisé. La mise en place d’un management par objectifs vivement souhaitée par le législateur organique ne s’est, dès lors, pas vraiment traduite dans les faits.

Les indicateurs de performance sont un outil parmi d’autres, mis en place par les administrations centrales, pour mesurer leur performance. Qu’elles en aient fait d’abord des indicateurs d’activité, et non de performance, est commun à tous les pays qui se sont dotés de constitutions financières de ce type. Que le nombre d’indicateurs ait été exagérément élevé, nous n’avons cessé de le dire, comme parlementaires en mission à deux reprises avec Didier Migaud, en 2005 et 2006. Qu’il soit facile d’en réduire le nombre, et de cesser de harceler les agents placés au contact de la population, à leur guichet, nous semblait déjà une évidence.

Les administrations centrales plaignantes aujourd’hui sont les premières responsables de la situation. Ce n’est pas la loi organique qui les contraint, tous les pays ont rejoint le même type de loi financière, c’est le système bureaucratique français, avec ses raffinements historiques qui a réinventé le « conomètre » de Courteline, en plus sophistiqué ! Il est saisissant de constater que le « service aux usagers » ne compte que pour 20% des indicateurs. La machine tourne pour elle-même. Elle est l’Etat souverain qui règne avec condescendance sur ses sujets et les administre selon un concept à dominante arithmétique.

Comment imaginer que des parlementaires puissent traduire à leurs électeurs les PAP et les RAP ? Les ministres eux-mêmes en seraient bien incapables. Le reproche qui peut être fait au Parlement, en revanche, est de ne pas avoir saisi la perche tendue sur la Loi de Règlement. C’était un des grands espoirs des fondateurs de la LOLF. Or le mythe du débat sur le budget initial reste un des vices rédhibitoires de la démocratie française. La LFI est un acte de communication avant d’être un exercice de prévision. L’article liminaire est illisible. Or c’est lui qui est censé tout révéler aux Français de la trajectoire de leurs comptes.

Il existe une nouvelle chance de nous fixer un nouveau cap de sincérité budgétaire et d’efficacité publique, ce serait de réaliser « la grande LOLF ». C’est-à-dire celle qui agrègerait les comptes de l’Etat, ceux de la sécurité sociale et ceux des collectivités locales. Le saut n’est pas si difficile à faire, car le programme de stabilité en constitue l’esquisse. Certes, il est écrit en comptabilité nationale, mais avec des clés de passage transparentes, l’exercice serait possible.

Pour l’instant, la volonté politique n’est pas réunie. Au fond, la France conserve un rapport embarrassé avec la transparence.

Et si c’était une des causes profondes du manque de confiance dans la politique ?

 

Lire l’article d’Acteurs Publics : https://www.acteurspublics.com/2017/07/05/indicateurs-et-barometres-des-outils-en-mal-d-autorite