La prolifération normative fait immédiatement penser à cette réplique célèbre de Sganarelle dans Le Médecin malgré lui. J’aime cette locution ; elle conclut par une goguenardise, une fallacieuse démonstration, une logorrhée indéchiffrable, un discours inintelligible.

Contraint à coups de bâton de soigner une demoiselle qui fait semblant d’être muette par stratégie amoureuse, le faux docteur se lance dans une péroraison absurde truffée de subtilités burlesques et de latin de cuisine, avant de conclure de la manière la plus abrupte : « Et voilà pourquoi votre fille est muette ! »

Comment ne pas avoir la même sensation face au harcèlement administratif qui paralyse la France. Toute initiative, l’énoncé du simple bon sens sont immédiatement condamnés au renoncement, en vertu d’un ordonnancement juridique tellement enchevêtré qu’il n’est plus au pouvoir de personne de le dénouer.

Le seul moyen d’atteindre l’objectif fixé par la loi elle-même oblige à en méconnaître certains articles, afin de ne pas perdre le sens de l’intention initiale. De nombreuses études analysent et chiffrent le coût de cette prolifération. Pourtant, elle se perpétue intarissablement. Elle agit comme une drogue ou un anesthésique sur les énergies les plus fécondes du Pays.

Il serait sage d’introduire dans chaque texte un rétrovirus juridique qui neutralise les éléments bloquants générés par une frénésie rédactionnelle incontinente. Dit autrement, il s’agit de soumettre enfin notre droit aux principes cardinaux de simplicité, d’accessibilité, de proportionnalité, d’adaptabilité. Une croissance puissante en jaillirait !

Souvent loi varie, bien fol est qui s’y fie.