L’application de la loi NOTRe et notamment son article 33 nous promettent un arrachage de cheveux pas ordinaire.

Cet article 33 traite des EPCI dont le seuil plancher devrait atteindre 15.000 habitants SAUF un certain nombre de dérogations. Celles-ci s’appliquent en fonction du seuil de densité à atteindre. A n’en pas douter, c’est sur ce point que les discussions vont faire rage.

Voici un extrait dont vous ne manquerez pas de saisir le sens.

« 1° La constitution d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 15.000 habitants ; toutefois, ce seuil est adapté, sans pouvoir être inférieur à 5.000 habitants pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ainsi que pour les projets d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre :

« a) Dont la densité démographique est inférieure à la moitié de la densité nationale, au sein d’un département dont la densité démographique est inférieure à la densité nationale ; le seuil démographique applicable est alors déterminé en pondérant le nombre de 15.000 habitants par le rapport entre la densité démographique du département auquel appartiennent la majorité des communes du périmètre et la densité nationale ;

« b) Dont la densité démographique est inférieure à 30 % de la densité nationale ;

A ce stade, avez-vous compris quelle est la densité nationale ?

Non, alors pas de soucis une précision dans ce texte devrait vous éclairer !!!

« Pour l’application du présent 1°, la population à prendre en compte est la population municipale authentifiée par le plus récent décret publié en application de l’article 156 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, la densité nationale est déterminée en divisant la somme des populations municipales des départements de métropole et d’outre-mer et des collectivités territoriales exerçant les compétences départementales par la somme des superficies de ces mêmes départements et collectivités territoriales, et la densité démographique d’un département, d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou d’un projet de périmètre d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est déterminée en divisant la somme des populations municipales authentifiées des communes qui le composent par la somme des superficies de ces communes. »

Pour tous ceux qui n’ont pas fait l’ENA, on aurait pu imaginer, par exemple, de prendre la densité de la métropole ou la densité de la métropole et des DOM. Trop simple ! Il faut ajouter les collectivités territoriales exerçant des compétences départementales !!! Prenons alors la direction du site de l’INSEE ou pourrait se trouver la fameuse densité nationale… : hélas rien ! Tant pis, essayons de faire nous même les calculs … Le problème est que nous ne ferons pas tous les mêmes.

Euréka, voici une densité nationale ! Diable, il nous faut maintenant appliquer des ratios à 30% et 50 % de cette densité pour chaque EPCI du département afin de déterminer quels seuils de population doivent être appliqués pour appliquer la réforme. (Seuil qu’il faudra sans doute déterminer en fonction du ratio entre la densité nationale et la densité départementale …)

Ah tout irait bien, s’il ne fallait pas aller jusqu’au centième près pour voir dans quelle case se situe tel EPCI car, malgré tout le luxe de détail, rien ne semble avoir été prévu en cas d’égalité à l’unité près.

La réforme territoriale dans un génie que nous n’oserions lui disputer pourrait avoir tenté de descendre jusqu’au centième d’habitant près.

Tout cela n’est que foutaise car le clou de la kermesse consiste en ce que les Préfets vont devoir proposer aux collectivités d’émettre un avis sur un schéma avec des seuils qui auront été calculés à partir des données 2015. Comme ces données vont changer en fin de la présente année avec les résultats du recensement. Le schéma sera immédiatement menacé de caducité faute d’avoir pris en compte le dernier décret publié. Des contentieux pourront donc s’ouvrir contre le schéma au motif que la densité appliquée est fausse au millième près !!!

Bataille d’experts en statistiques démographique, d’arpenteurs et de géomètres, délais de publication incohérents, la Réforme territoriale menace de virer au cauchemar. Une bataille de chiffres ne permettra jamais de faire le bonheur de l’Orne et des Ornais.

Nous aurions été capables de nous entendre sans ces textes abscons.

Nous éviterions bien des discordes, nous serions novateurs et nous offririons beaucoup d’avantages aux Ornais, en créant le premier Département-métropole de France ! Je l’ai proposé depuis deux ans dans différents billets, quand j’ai vu que cette réforme nous conduisait dans le mur. Ainsi, seraient finies les batailles de chiffres, éteintes les calculettes et rangés les ciseaux. Et place à l’action au seul service des habitants. Nous nous serions épargné de nouveaux découpages et de longs débats au profit d’actions à leur service.

Pour paraphraser à l’envers « Monsieur Jourdain du Bourgeois-Gentilhomme », je n’en veux pas tant que cela à mes parents de m’avoir évité l’ENA 😉