Françoise Comte nous a quittés le 18 janvier 2017. Elle laisse, à jamais, dans nos cœurs, l’empreinte d’un courage, d’une force et d’une détermination inouïes.

Nous étions rassemblés, ce mercredi 25 janvier, pour rendre hommage à une grande figure de la Résistance ornaise dont la personnalité aura profondément marqué tous celles et ceux qui ont eu le privilège de la rencontrer.

Déroulons un peu le fil de sa vie. Madame le Préfet a prononcé un éloge lumineux sur cette existence d’exception.… Françoise Paysant est née en 1926 au cœur d’une famille de résistants. De celles qui refusent la fatalité, la défaite de l’armée française en 1940 et l’Occupation. Ses parents Édouard et Madelaine partagent la volonté de s’opposer à l’envahisseur. Avec toutes les prises de risques et les conséquences qui en découleront. Ils veulent défendre, de toutes leurs forces, la liberté toujours si exigeante et fragile.

Françoise, alors adolescente, prendra part à ce combat. Son père ne tarde pas d’ailleurs à employer cette vive intelligence pour servir sa cause. Elle mémorise alors des messages qu’elle doit transmettre à Robert Aubin, le chef départemental de l’Organisation Civile et Militaire qui réside à Fontenay-sur-Orne. Elle transporte également des documents dissimulés dans le guidon de sa bicyclette ou encore dans des bidons d’huile. Destination : Argentan où l’attend M Rousseau…. La jeune fille déploie des trésors d’inventivité. Au Havre, alors qu’elle accompagne son père, elle dessine le plan d’un site stratégique.

Le destin de cette famille unie bascule en 1943. Le 4 juillet, l’une des forteresses volantes qui viennent de bombarder deux usines du Mans est abattue et s’écrase à Saint-Clair-de-Belfonds. 7 des 9 membres d’équipage parviennent à ouvrir leur parachute. Edouard Paysant, responsable de l’organisation des opérations aériennes, décide de tout tenter pour mettre ces aviateurs en sécurité. Il y parvient mais s’expose. Il doit quitter l’Orne et mettre sa famille à l’abri.

Françoise Paysant quitte donc Sées avec sa mère, sa sœur et son frère pour se cacher à Assé-le-Boisne, dans la Sarthe. Elle effectue encore une mission pour son père afin de se procurer des faux papiers auprès du résistant Octave Dallier, secrétaire de mairie à Saint-Denis-sur-Sarthon. Hélas, à son retour, elle apprend que ses grands parents paternels viennent d’être arrêtés. Il en sera de même pour Françoise et sa mère, sur dénonciation, le 21 juillet 1943.

Elle vit alors l’horreur, entre la prison et les interrogatoires brutaux qui n’entameront pas son silence. Elle ne cédera jamais, même confrontée au résistant Robert Aubin. Françoise Paysant est déportée, avec sa mère, le 4 août 1944 et acheminée vers le camp de concentration de Ravensbrück. Immatriculée dans la série des 51000, elle part vers le Kommando de Gartenfeld, dépendance du camp de Sachsenhausen, située dans la banlieue de Berlin. Françoise et Madelaine puiseront l’une dans l’autre l’énergie pour survivre.

Printemps 1945. Les forces alliées libèrent Françoise qui rejoint Paris et le Lutétia, lieu d’accueil  des déportés à leur retour de camp. Sa mère, soignée en Allemagne n’a pu partir avec elle et les deux femmes vivent cette séparation comme une déchirure.

Françoise rejoint Sées et retrouve une maison dévastée. Elle trouve refuge chez un parent à Alençon. Elle surmonte une double pleurésie et reprend ses études. Devenue ingénieur, elle peut ainsi conserver l’entreprise familiale. La vie a repris ses droits. Elle épouse Pierre Comte ; ils auront 4 enfants. Son quotidien bien occupé ne l’empêchera pas de prendre des responsabilités au sein de l’Union départementale des Combattants Volontaires et de la Résistance qu’elle préside pendant 15 ans. Elle est également très impliquée, entre autres, dans l’association des Déportés, Internés et Familles de disparus de l’Orne dont sa sœur, Denise Colin, a pris les rênes. Dans l’Orne, l’engagement associatif de Françoise Comte est aussi dense que sincère. Elle ne comptera ni son énergie ni son temps au service de ceux qui ont versé leur sang pour notre liberté.

Cet engagement sera doublé d’une volonté farouche de transmettre la mémoire, de témoigner auprès des jeunes générations dans les établissements scolaires lors du Concours National de la Résistance et de la Déportation. Jamais elle ne s’est départie de cette bienveillance dont elle faisait preuve dans ses échanges avec les plus jeunes. Un jour, elle a eu ces mots pour les lauréats du Concours National de la Résistance et de la Déportation, des paroles qui trouvent écho en chacun de nous, dans les tourments qui nous happent : «  nul ne vous souhaite d’avoir à choisir comme nous avons eu à le faire. Mais si cela devait arriver, nous espérons que vous auriez fait le bon choix ».

Nous aussi, luttons contre des destins trop évidents, contre les ténèbres, de toute notre âme.

Là est notre devoir d’humains.

En souvenir de Françoise Comte et de tous ceux qui ont œuvré dans l’ombre pour la paix, ravivons à notre tour, pour nos enfants et nos petits enfants, l’esprit de résistance !