Pourquoi sommes-nous si imprévoyants, pourquoi laissons-nous le temps filer, sans rendre visite ou inviter les amis qu’on aime ?
J’en veux au quotidien qui consume nos vies et les asservit à l’horizon étriqué de l’instantané.

Aujourd’hui, François Digard, Maire Honoraire de Saint-Lô est parti. Vite. Je ne savais pas qu’il était malade. Je m’en veux. J’aurais tant aimé lui redire mon affection. Mon amitié. Le plaisir que j’avais à partager notre complicité, avec Jean Callewaert.

Avec François, nous nous sommes liés d’une amitié indestructible à Madère, en octobre 1988, lors d’une Assemblée des Régions d’Europe. Nous étions l’un et l’autre vice-président du Conseil Régional, et candidats potentiels à la Mairie de nos villes. Lui pour Saint-Lô, moi pour Alençon. Nous avons passé des dizaines d’heures à partager nos réflexions, sur la fonction de Maire, sur le destin délicat de nos villes moyennes, sur leurs qualités irremplaçables, leurs risques, leur place dans l’intercommunalité, leurs relations avec les départements, les régions. Leurs projets. Leurs moyens. L’art et la manière de donner sens au « vivre ensemble ».

François était très engagé. Il aimait la politique. Il en connaissait tous les mérites. Et les limites. Il décelait déjà ce que la fonction de premier magistrat supposerait de distance avec l’esprit partisan. Il s’y tiendra avec rigueur. Il a été un grand Maire. Comme tous les grands élus, il habitait la fonction, il avait épousé sa ville. Et l’aimait, et aimait sa population, comme on aime sa famille. Il s’y est consacré de toutes ses forces.

Il était droit. Fidèle. Exigeant sur les principes de loyauté, de sincérité, dans un univers qui n’en abuse jamais.

D’autres sauront mieux que moi évoquer son œuvre. Ce soir, je voulais simplement témoigner de sa préparation exigeante à la responsabilité municipale, et évoquer l’ami, la belle personne qu’il était et qu’il reste dans ma mémoire. Avec son sourire, son regard malicieux et cerclé qu’on oubliera jamais.

Que les siens veuillent bien trouver dans cette vie consacrée au service des autres le réconfort qu’ils méritent.