L’examen par le Parlement de la loi de règlement du Budget 2005 (LR2005), la semaine dernière, constitue une étape essentielle vers la rénovation de la fonction de contrôle du Parlement. En attendant l’examen de la première LR au format LOLF, en 2007, il s’agit de revenir sur les principales innovations introduites cette année. Si l’exercice reste perfectible, il faut en effet saluer les efforts accomplis, notamment au Sénat, pour renforcer cette étape du cycle budgétaire trop souvent délaissée par les parlementaires…

Le projet : On notera tout d’abord, concernant le projet de loi lui-même, l’absence d’une préfiguration des rapports annuels de performances (RAP) sur le modèle des avant-projets annuels de performances (PAP) du PLF2005. On ne peut que regretter cette absence dès lors que les avants-RAP auraient permis aux parlementaires de se familiariser avec ces documents et, sur le modèle des avants-PAP en 2005, d’en proposer quelques améliorations.

Les auditions préalables : Outre les auditions classiques – ministre des Finances, ministre du Budget et Premier-président de la Cour des comptes – les Commissions des Finances des deux assemblées ont procédé à une série d’auditions concernant la gestion concrète de certains programmes. Mais il faut souligner ici une différence de point de vue des deux commissions :

1) À l’AN : La Commission des Finances l’AN a choisi d’auditionner des responsables de programmes (1, 2, 3) ainsi que les rapporteurs spéciaux concernant les débats « sectoriels ». On notera néanmoins le caractère extrêmement formel de ces auditions. On pOURRA également s’interroger sur l’utilité d’auditionner les rapporteurs spéciaux d’un côté, les responsables de programmes de l’autre et de ne confronter les ministres que durant la discussion en séance publique. Voir également la question de la responsabilité des RPROG dans un précédent billet.

2) Au Sénat : C’est au Sénat que les innovations sont les plus poussées. La Commission des Finances du Sénat a en effet pris le contre-pied de la solution choisie à l’AN. Elle a mis l’accent sur l’audition des ministres gestionnaires et c’est ainsi 10 auditions de ministres qui ont été organisées. Il faut noter la très grande transparence autour de celles-ci. Ces auditions d’une heure étaient ouvertes à tous les sénateurs mais également au public et à la presse. Elles ont bien entendu, tout comme à l’AN, fait l’objet d’un compte-rendu mais, contrairement à l’AN, elles ont été également retransmises sur la chaîne parlementaire et les vidéos sont d’ailleurs consultables sur le site du Sénat.
Sur le fond, les auditions mettent en confrontation les ministres avec les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis, dégagés du caractère quelque peu solennel de la séance publique. S’il faut saluer cette initiative particulièrement prometteuse, on regrettera néanmoins le caractère encore trop formel des auditions.

La discussion – les débats sectoriels : Reprenant les expérimentations de la discussion de la LR2004, le Sénat a organisé 4 débats dits « sectoriels » permettant une confrontation entre le ministre d’une part et les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis et les orateurs des différents groupes. On notera que les temps de parole ont été aménagés pour permettre une plus grande interactivité et que ces auditions étaient également retransmises sur la chaîne parlementaire. À l’AS, trois débats sectoriels ont été également organisés. Il faut saluer l’augmentation sensible du temps consacré à l’examen de la loi de règlement puisque la seule discussion en séance publique s’est déroulée sur 2 séances au Sénat et 4 à l’AN.

Le chaînage vertueux : S’agissant du moment de l’examen de la LR, le Parlement a décidé contrairement à l’année précédente de placer cet examen avant le Débat d’Orientation Budgétaire et non plus avant la discussion de la LF, faisant ainsi évoluer le chaînage vertueux prévu dans la LOLF. Je reviendrai ultérieurement sur le DOB 2007.

Le contrôle du Conseil constitutionnel : Enfin, la LR2005 sera particulièrement intéressante puisqu’elle a été déférée le 4 juillet par les députés au contrôle du Conseil constitutionnel, notamment s’agissant de la sincérité du projet. Cette question avait d’ailleurs été soulevée à l’AN dans le cadre d’une exception d’irrecevabilité. Il sera particulièrement intéressant d’analyser la décision 538DC du Conseil sur ce point. La sincérité avait été la grande absente de la décision 530DC sur la LF2006 et la future décision du Conseil pourrait donc être une occasion unique pour faire évoluer le champ du principe de sincérité budgétaire. A suivre…

En somme, l’examen de la LR2005 constitue une étape importante vers la revalorisation du contrôle budgétaire du Parlement. Il est à souhaiter que ces innovations, notamment celles entreprises au Sénat, soient encore poussées plus loin et que l’Assemblée nationale s’aligne sur ces méthodes de contrôle. Reste que le Parlement a démontré sa réelle volonté de s’approprier la LOLF et il est à souhaiter que sa mission de contrôle de l’action gouvernementale sera en 2007 avec la diffusion des premiers RAP encore plus approfondie.

Catteau Damien, Université de Lille 2, Institut de Recherche en Droit Public.