Un visiteur fidèle me pose la question de savoir si je suis Démocrate chrétien ? Libéral ? Les deux ? Et si tout cela est bien compatible ?

Ce visiteur est Koz dont je vous recommande le Blog.

Pardon d’utiliser ce billet pour lui répondre, mais, au fond, n’est-ce pas l’utilité d’un Blog de se parler tous ensemble, franchement, librement ?

Comme mon site personnel en témoigne, je revendique avoir été construit par la pensée d’Emmanuel Mounier : le personnalisme communautaire. Et continuer d’y puiser des références utiles dans ma vie d’élu. Pour les plus jeunes, et en simplifiant à l’extrême, cette pensée politique affirme que l’Homme est une personne. C’est à dire un être unique et singulier qui vit et agit au sein d’une communauté humaine. Une personne responsable qui a conscience d’être plus que sa vie et qui aspire au dépassement, à la transcendance, et ce en résonance avec le Christianisme.
Sur l’échiquier politique ce courant de pensée se situait au centre. Puis l’élection du Président de la République au suffrage universel a coupé progressivement la vie publique française en deux courants principaux, faisant ainsi éclater ceux qui se trouvaient au milieu. Certains sont allés à gauche d’autres à droite. Ce qui est mon cas. Disons, pour faire simple, que lorsqu’il a fallu décider si je croyais d’abord au groupe et ensuite à la personne ou l’inverse, j’ai choisi l’inverse.

Voilà pour le côté démocrate chrétien que, nous seulement, je ne renie pas, mais qui constitue encore mon socle de valeurs et de références.

Alors comment ceci peut-il se concilier avec la liberté économique ? Disons-le franchement, ma pensée a évolué progressivement. Durant les 30 glorieuses, la croissance économique a financé tout le progrès social sans que nous ayons beaucoup à nous poser de questions. Les fondamentaux de la société fonctionnaient : la famille, l’école, l’emploi. Si la richesse n’était pas équitablement répartie, l’ascenseur social fonctionnait à plein régime de sorte qu’en retroussant nos manches et un peu de chance, nous pouvions progresser très vite. J’en ai personnellement profité. Honnêtement, je n’ai jamais eu le sentiment, pendant toute ma scolarité, qu’un enfant de bourgeois pouvait avoir plus de chance que moi. Parce que ce n’était pas le cas.

L’économie était encore très administrée mais pas encore globalisée. De sorte que la mauvaise gestion publique se trouvait effacée, de temps en temps, par l’inflation et les dévaluations.

Puis, il y a 30 ans maintenant, les chocs pétroliers ont brutalement déréglé la machine. Aveugles, inconscients, irresponsables, nous n’avons pas compris que notre logiciel était périmé. La dette a masqué le maintien d’un niveau de vie totalement artificiel laissant croire que notre Pays créait encore assez de richesses pour jouer son rôle comme avant. En réalité, à mesure de notre faillite financière, se dessinaient la faillite économique et morale de notre pays.

Depuis plusieurs années, j’ai acquis l’absolue conviction que la seule manière de réaliser le progrès social était d’abord de rendre notre économie efficace. Et que cela passait par notre adhésion non ambiguë à l’économie de marché, reposant elle-même sur la liberté économique. Et cela est clairement exprimé dans le manifeste pour les valeurs de notre Club « Courage et Convictions ». Je rappelle que ce manifeste posait les conditions de notre adhésion à la nouvelle candidature de Jacques Chirac, en 2002, ce qui nous donne légitimité aujourd’hui à nous poser quelques questions.

Ai-je aujourd’hui des troubles de conscience entre mes valeurs de démocrate chrétien et ma pratique de libéral ? Pas du tout. J’assume pleinement cette élucidation qui m’a conduit à conclure que la dignité de la personne humaine passe par sa responsabilité individuelle, que le travail est une valeur, et que la société doit l’égalité des chances mais pas l’égalité de résultats. Je crois à l’entreprise comme outil de création de richesse. Et au risque d’entreprendre si peu encouragé dans notre pays. Je pense que sans création préalable de richesse il ne peut y avoir de progrès social ni personnel ni collectif. Bref, non seulement j’assume, mais je m’irrite des ambiguïtés que la droite française entretient avec l’économie de marché. Je pense que la politique manque de vérité, de sincérité, de risques. Elle est gérée comme un marché sans âme !

En résumé, je pense que notre économie mériterait infiniment plus de flexibilité et notre politique plus d’inflexibilité !

Que ceux que j’aurais pu blesser par ces idées ne m’en veuillent pas, mais cela m’a fait du bien de dire ce que je pense. Franchement.

Et merci de votre patience.