Secrétaire général de l’Elysée puis Ministre des Affaires étrangères, Jean François‑Poncet, Sénateur du Lot et Garonne, livre d’une plume alerte et élégante une « chronique impressionniste et personnelle » de près d’un demi-siècle de diplomatie française. Réconciliation franco-allemande, étapes successives de la construction européenne, conflit israélo-palestinien, relations Est-Ouest, indépendance de Djibouti, intervention soviétique en Afghanistan, installation d’une république islamique en Iran, guerre Iran-Irak, chute du mur de Berlin et réunification allemande figurent parmi les pages de l’histoire des relations internationales évoquées par un de ses acteurs les plus clairvoyants.

C’est probablement à l’Allemagne que l’auteur consacre les passages les plus forts de ses mémoires. Dans le chapitre « L’Allemagne terrible de mon enfance », il rend hommage à la capacité d’analyse et à la sagacité de son père, ambassadeur à Berlin et germaniste averti, qui avait très tôt compris les dangers de « la mise au pas de tout un peuple (et des) gesticulations guerrières du régime qui s’installait solidement au pouvoir », en un mot qui avait saisi le sens de l’« implacable machine de guerre » mise en place par les Nazis. « Toute l’énergie que mit mon père à sonner l’alarme fut vaine », déplore le Sénateur, qui se demande à cette occasion si « l’incapacité de prendre en temps utile la mesure des défis » ne serait pas « l’une des caractéristiques les plus préoccupantes de notre tempérament national ».

Analysant ensuite « l’insubmersible relation franco-allemande » depuis la fin de la guerre, M. Jean François-Poncet relève que si son père avait été le « témoin de l’entreprise belliqueuse des Nazis dans une vieille Europe soumise à la loi des armes », lui-même avait pu, au cours de sa carrière de diplomate puis en tant que ministre, être l’observateur de la réconciliation entre les deux pays.

S’agissant de la période de la réunification allemande, le Sénateur regrette le « rendez-vous historique manqué » entre la France et l’Allemagne. Le Président de la République française aurait dû, selon lui, être aux côtés du Chancelier allemand tandis que se déroulait cet épisode essentiel de l’histoire de l’Europe : le souvenir de Verdun aurait mérité ce « symbole impérissable », conclut-il sur ce point.

« Comment naît-on à la politique ? Quelle alchimie secrète, quelle envie tellurique, quel impératif intime pousse certains hommes à se lancer dans cette arène où tous les coups sont permis, à prendre le risque de l’échec à la sortie des urnes ? ». Telle est la question posée dans le dernier chapitre, où M. Jean François-Poncet évoque les nombreuses années consacrées à un département dont il est l’élu depuis les élections cantonales de 1967.

Jean François-Poncet conclut ses mémoires sur l’avenir de l’Europe, notant que dans une Union à vingt-sept l’entente entre la France et l’Allemagne reste l’indispensable pilier de la construction européenne qui, selon cet Européen convaincu, s’impose comme le seul levier dont les européens disposent « pour se faire entendre des mastodontes que sont les Etats-Unis, la Chine et l’Inde ».