Décidément, les campagnes présidentielles deviennent des sortes de kermesses ou des foires aux annonces. Les candidats, tels les camelots antiques, vendent leur nouvelle poudre médiatiques de perlimpinpin que sont les « annonces ». Le Président sortant nous avait éberlués, il y a 5 ans, en nous promettant une baisse des prélèvements obligatoires de 4 points de PIB (qui se soldera au final par une augmentation) et voilà que son concurrent François Hollande nous invente cette année une tranche marginale d’IRPP à 75 %, tout aussi insolite et irréalisable.

Je ne participerai pas à la caricature de cette annonce, j’ai trop souffert, il y a 5 ans, pour tenter d’expliquer l’inexplicable et avoir envie de me moquer aujourd’hui de ceux qui ont à faire la même chose dans l’équipe du candidat socialiste.

Je me permettrais simplement un conseil. N’en faites pas trop pour trouver des fondements rationnels à une annonce qui ne l’est pas ! Ce n’est rendre service à personne, ni au Pays, ni au candidat, ni à vous-mêmes.

Profitons en revanche de cette saillie bien imprudente pour comprendre où elle prend sa source et la mauvaise réponse qui est apportée.

La difficulté tient au fait qu’en période de crise, les écarts de revenus constituent des dangers redoutables pour la cohésion sociale.

Alors, la tentation facile pour le politique est de promettre de réduire ces écarts par la punition immédiate, à savoir, une fiscalité confiscatoire. L’effet est immédiat, les classes populaires pensent qu’elles sont ainsi vengées d’un sort malheureux et les candidats sont supposés engranger des tonnes de suffrages supplémentaires.

C’est sans compter avec le simple bon sens. Un impôt de 75% est tout simplement impraticable. D’ailleurs, il n’est pratiqué dans aucun pays au monde. Cette annonce faisait florès au siècle dernier, au temps de l’économie administrée, nationalement encadrée par des murs épais, avec un contrôle des changes. Dans une économie ouverte, cette annonce est proprement désastreuse car elle donne le sentiment d’une ignorance par la France des lois les plus élémentaires de l’économie de marché.

Lors des deux dernières décennies du 20ème siècle, plus de 50 nations ont massivement baissé leurs taux d’impositions marginaux. Les meilleurs résultats d’une économie en croissance ont été obtenus par les pays collecteurs d’impôts raisonnables, et les plus mauvais chez les collecteurs d’une grande part d’une économie en stagnation. Plus personne ne conteste que des taux marginaux élevés peuvent nuire à la performance économique. Tout simplement parce qu’ils réduisent la volonté des gens à travailler jusqu’à leur potentiel, à prendre des risque d’entreprendre, de créer et de développer de nouvelles activités. L’augmentation massive des taux marginaux entraine souvent des conséquences graves sur la croissance économique, l’offre de travail et la formation de capital. Disons-le franchement, la fuite des capitaux va souvent aussi de pair avec la fuite des cerveaux.

La solution proposée par François Hollande n’est donc pas réaliste. Comme elle ne marche pas, elle ne passera même pas le cap des législatives. C’est pourquoi, il ne sert à rien de vouloir donner de la crédibilité à une annonce non crédible.

Faut-il pour autant se résigner à des écarts de revenus trop élevés ? Non, mais il existe d’autres outils. Notamment en favorisant une part de rémunération en actions. En transformant ces revenus élevés en épargne longue pour financer l’investissement de long terme dont l’Etat n’a plus les moyens. En encourageant plus encore la création de fondations pour la conduite de l’action publique avec des fonds privés.

L’erreur commise est de laisser croire aux Français non avertis de ces questions que l’impôt pourrait être un instrument de morale publique. Il n’en est rien, l’impôt est un instrument de rendement. Les transferts sociaux s’opèrent souvent sans succès et avec beaucoup d’effets d’aubaine par la fiscalité. Le meilleur outil est le crédit budgétaire ouvert à des bénéficiaires sur des critères solides, récents, facilement vérifiables et distribués avec simplicité et efficacité par des administrations non tatillonnes mais éveillées sur la réalité des situations.

La sanction sur les hauts revenus dépend des saisons, je conserve le souvenir amusant d’une surenchère du Groupe socialiste au Sénat qui voulait à tout prix réduire la fiscalité des footballeurs qui avaient gagné la coupe du monde en 1998 ! Comme quoi les gains d’un footballeur sont parfois réputés plus respectables que ceux d’un capitaine d’entreprise qui crée beaucoup d’emplois.

De toute manière, les candidats à la Présidence de la République feraient bien, avant d’annoncer de nouveaux prélèvements, de remarquer que leurs programmes prévoient déjà de prélever en recettes publiques nouvelles plus de 70% de l’accroissement du PIB à l’horizon 2016. S’ils veulent faire plus, autant confier la Pays à Fidel Castro qui en a l’expérience amère. Le Président sortant sur la période 2007/2011 n’a jamais été informé qu’il avait consommé en dépenses publiques la quasi-totalité de l’accroissement du PIB sur la durée de son quinquennat.

Si les candidats voulaient bien cesser de jouer avec nos émotions, nos naïvetés, notre faible maitrise de tous ces sujets et s’interdire de nous considérer comme du gibier de sondage, la démocratie s’en porterait mieux et la gouvernance future aussi, car toutes les promesses intenables sont source de déceptions et de désaffection du Peuple pour le politique et pour la démocratie pendant la durée du quinquennat.

Disons non désormais à la « foire aux annonces ! »