Dans un récent rapport sur la réforme de l’État et les audits de modernisation, la Commission des Finances du Sénat revient sur le nouvel outil de la conduite de la réforme de l’État : les audits de modernisation. S’il ne s’agit pas véritablement d’un audit des audits, comme le prône pourtant le Président de la Commission J.Arthuis, la Commission dresse bien un premier bilan, quelque peu mitigé, des audits de modernisation et propose une série de mesures à la fois pour renforcer une démarche à l’ampleur encore trop limitée.

Lire le rapport : « Réforme de l’État : auditer pour agir »

Bien entendu, je vous recommande vivement la lecture de ce rapport mais revenons rapidement sur le bilan des audits. Certes la méthode est relativement innovante, inspirée (fortement) des stratégies ministérielles de réforme conduite de 2002 à 2005 et même approfondie : recours aux inspections générales, à des consultants privés, pilotage par un comité ad hoc relevant de la DGME, transparence sur la conduite, les préconisations et les résultats des audits. Par ailleurs, la démarche des audits a connue une incontestable montée en puissance : 104 audits réalisés sur quatre vague successive et portant sur plus de 100 Md€ (40% des dépenses de l’État). Concernant les résultats concrets, les audits ont eu un impact direct sur le PLF2007 (diminution d’1 point en volume de dépenses et 15000 postes non renouvelés) et le gain attendu se chiffrerait à 3 Md€ sur 3 ans.

Pourtant, ce bilan en apparence positive laisse entrevoir quelques limites : à l’heure actuelle, il est impossible de décomposer ce gain attendu laissant planer le doute sur cette annonce, les rapports, pour certains toujours pas publiés, ne chiffrent que rarement les impacts attendus avec précision. Et si la transparence est faite autour de la conduite des audits voire des orientations à mettre en oeuvre, il n’en va pas de même pour le suivi de l’avancement des préconisations retenues. Plus simplement, comme le conclut d’ailleurs J.Arthuis, la démarche des audits de performance est plus un « toilettage des procédures et des structures » qu’un véritable « grand soir de la dépense publique ». La démarche manque en effet d’ampleur notamment quand on la compare aux procédures de révisions des programmes existantes dans certains pays étrangers (notamment au Canada).

En effet, nous avions déjà pu noter, dans un précédent billet, la différence fondamentale entre les audits de modernisation et ces procédures de révision des programmes, notamment concernant leur objet. Il faut donc coupler les audits à une démarche plus globale, ce que propose la Commission des Finances en demandant la création d’audits des missions de l’État. Elle propose par ailleurs plusieurs mesures visant à étendre le champ des audits de modernisation notamment aux opérateurs de l’État et aux administrations de Sécurité Sociale.

Enfin, on notera que l’une des faiblesses de la démarche des audits est de ne pas associer suffisamment le Parlement. La Commission des Finances marque, par une série de propositions, sa volonté d’opérer un suivi de la conduite de ces audits notamment par le biais des questionnaires budgétaires, des auditions des équipes d’audits et des ministres, de la réalisation de tableaux de bord des engagements de ces derniers ainsi que du contrôle de l’avancement des plans d’actions préconisé par les rapports d’audits.

Que ses mesures soient ou non suivies d’effet (notamment celles relevant du gouvernement), la Commission des Finances du Sénat marque en tout cas une fois de plus sa volonté de contrôler étroitement l’action du gouvernement en matière de modernisation de la gestion publique et de la conduite de la Réforme de l’État qui en est son corollaire.

Catteau Damien, Université de Lille 2, Institut de Recherche en Droit Public (IRDP-GERAP).