J’ai eu, mardi dernier, le grand plaisir de donner à Toulouse une conférence à l’initiative de la Fédération Régionale des Travaux Publics Midi-Pyrénées, en présence, entre autres intervenants de grande qualité, de Carole Delga, ex secrétaire d’Etat au commerce et de Dominique Reynié, tous deux candidats à la présidence de la future région Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées. Et en présence de Bruno CAVAGNE, Président de la Fédération Nationale des Travaux Publics.

Mon intervention visait à délivrer un message d’espoir, malgré la morosité persistante de la situation du secteur des travaux publics. En effet, 2015 sera sans doute une année noire, et 2016 pourrait l’être également : le secteur des travaux publics a perdu 25% de son chiffre d’affaires depuis 2007, les carnets de commande tardent à se remplir. De plus, les moyens de l’Etat consacrés à l’investissement se réduisent et la marche des collectivités locales est entravée par une perte de visibilité sur leurs missions et par une tension sur leurs ressources. Or, la commande publique représente 70% des 40Mds€ de chiffre d’affaires du secteur !

Ce tableau apparaît donc inquiétant et douloureux. Notons cependant que, dans cette situation il n’y a aucune cause qui soit imputable à l’extérieur. Tout dépend de nous, la France. Si nous décidions enfin d’y remédier, sans prétexter que c’est l’Europe ou le Monde qui contrarient notre envie d’avancer, de nouvelles perspectives s’ouvriraient. A mon sens, il y aurait quatre priorités à traiter.

Rétablir la confiance

La confiance est le cœur de la machine économique. On l’oublie trop souvent. Il faut donc que nous retrouvions collectivement confiance dans notre capacité à réussir et dans l’engagement de toutes les composantes du secteur des travaux publics. Et qu’une confiance réciproque s’installe définitivement entre entreprises et pouvoirs publics.

Appliquer un droit raisonnable

Le droit de l’urbanisme, le droit de la commande publique, le droit administratif en général sont devenus les pires ennemis de la croissance. Il devient urgent, pour rétablir la confiance, de poser comme obligation pour l’Etat d’alléger son corps de règles, voire de le suspendre, un temps donné. Cela relancerait les projets et leur ferait gagner plusieurs mois, voire une ou deux années, afin d’éviter l’asphyxie de notre économie, la suppression de nos emplois. Appliquer un droit raisonnable ne coûte rien ! Au contraire, cela pourrait rapporter gros ! C’est une question de volonté.

Cesser de s’abriter derrière le prétexte des finances publiques

Le cancer des finances publiques françaises se situe dans les dépenses de fonctionnement, qui asphyxient le Pays. Sur ce point, il faut tordre le cou à une légende : la France ne baisse pas ses dépenses publiques. Elle y a renoncé depuis longtemps ! Cela ne s’est jamais produit « toutes administrations confondues APU». Les baisses annoncées sont fictives, car ce sont des « baisses de la hausse » et elles se limitent à des jeux d’écriture, pour ne pas dire à des jeux de bonneteau, entre les comptes des différentes administrations.

En revanche, je crois en la grande vertu des investissements, dès lors qu’ils créent de la richesse, de l’emploi et de la croissance économique. Je parviens dans l’Orne à maintenir mon investissement contre vents et marées, notamment sur les routes, en réduisant mon fonctionnement, hors dépenses imposées par l’Etat. Et j’affirme, à la lumière de 20 années de travaux ininterrompus en finances publiques, qu’il serait parfaitement possible de redéployer, au niveau national, une dizaine de milliards d’euros par an (sur 1.200) des dépenses de fonctionnement vers l’investissement, sans aucune  réduction du modèle social français, lequel ne doit jamais confondre solidarité et gaspillage. Dix milliards, c’est un peu moins que la dérivée des dépenses de fonctionnement d’une année sur l’autre. Commençons par investir les liquidités injectées par la BCE plutôt que de les utiliser pour s’endetter ! Ce sont donc des programmes d’investissement ambitieux, notamment en infrastructures qui doivent être engagés et financés sur du long terme. A nouveau, c’est une question de volonté.

Faire confiance aux collectivités pour s’organiser territorialement :

La réforme territoriale annoncée pour rendre l’action publique plus efficace au bénéfice des Français, s’est transformée en chemin de croix pour accoucher d’un charabia législatif. La seule entité ayant échappé à la réforme est pourtant la plus sclérosée, c’est-à-dire l’Etat ! Là encore, cette réforme territoriale aurait pu prendre une orientation tout à fait positive pour le Pays. Il aurait suffi de poser un principe de liberté conventionnelle afin que les régions, les départements, les intercommunalités et les communes contractent entre eux, pour que ce soit le mieux placé qui rende le service au meilleur prix. Ces collectivités devraient être autorisées à, d’une part, organiser et mettre en place librement ensemble un back-office organisant l’action publique, en mutualisant toutes les fonctions support et, d’autre part, ouvrir un front office commun proche des habitants. Les lois de décentralisation qui se sont enchainées ont confondu deux dimensions différentes de l’action publique : la dimension démocratique, celle où les citoyens élisent leurs représentants à chacun des niveaux territoriaux significatifs (local, départemental et régional), et la dimension gestion publique qui ne nécessite nullement des périmètres identiques en France entière, ce qui n’a aucun sens.

Je pourrais hélas choisir de nombreux autres exemples, mais ceux-ci suffisent à constater qu’en effet nos difficultés sont toutes surmontables et qu’elles ne dépendent que de nous. En résumé, Oui la crise est rude, oui les menaces sont fortes, mais le rebond dépend de nous ! C’est la bonne nouvelle. Ce dont nous avons besoin ce sont des défricheurs d’avenir. Des optimistes offensifs, luttant contre la sinistrose. Des explorateurs d’un futur dans lequel nous aurons à cœur de marquer notre emprunte.