Ne soyons pas naïfs, cette épreuve est née d’un pari électoral assez médiocre de David Cameron. Par son stratagème, il a cependant entraîné une série d’effets difficilement prévisibles, mais pas tous inutiles. D’un côté, ne pas rester en Europe pour le Royaume Uni est vite apparu comme une « folie », et probablement un effondrement annoncé de toute son industrie financière. En jouant la carte de la peur, il a déstabilisé son opinion publique. D’un autre côté, le départ du Royaume Uni a clairement illustré que cela sonnerait la fin du rêve européen.

De ce jeu de roulette russe, il serait opportun de tirer les meilleurs enseignements, et peut-être d’en profiter pour réinventer l’Europe.

S’il est parfaitement logique que l’Union européenne impose à chacun des États membres des principes sans lesquels il serait impossible de préserver l’équilibre de l’ensemble, il faut parallèlement que dans des domaines moins fondamentaux, elle respecte davantage le principe de subsidiarité.

L’Union s’est en effet donné une mauvaise image en s’occupant du menu détail de la vie des citoyens européens, au lieu d’imprimer son autorité sur l’essentiel, c’est-à-dire la stabilité, la coordination et la gouvernance. Le principe de subsidiarité, qui instaure que chaque instance communautaire ou nationale tranche sur les questions où la responsabilité de l’ensemble n’est pas en cause, doit être respecté. L’Union doit se consacrer d’abord à mettre en œuvre ce qu’elle est le plus susceptible de mener avec succès et légitimité. Cela a été malheureusement trop peu respecté par les fonctionnaires européens de Bruxelles, à l’image des administrations centrales françaises qui continuent de vouloir tout régenter de Paris. Comment ne pas avoir perçu plus tôt le sentiment d’exaspération des citoyens européens face à une commission européenne qui par son arsenal technocratique s’immisce en permanence dans les prérogatives des droits nationaux ? Qu’elle légifère ici sur la taille des portes, là sur les règles de sécurité alimentaire… Les États-Unis, dont l’histoire et le modèle fédéral servent souvent de référence à la construction européenne, accordent à chacun des États fédérés une autonomie juridique bien supérieure à celle que possèdent aujourd’hui les États de l’Union européenne. Pour que les citoyens de l’Union et en particulier les citoyens britanniques ou français adhèrent au projet européen en permanente construction, la bureaucratie européenne doit impérativement cesser de chercher à étendre ses pouvoirs aux dépens de la souveraineté des citoyens. En limitant ses actions aux seules interventions pour lesquelles elle est l’acteur le plus efficace, et en préservant aux institutions nationales et locales le soin de décider, de piloter ou de mettre en œuvre les projets qui relèvent de leurs compétences, l’Union évoluerait vers une conception plus pragmatique et plus justement confédérale.

Le respect de ces principes permettrait de remédier à l’image négative des institutions européennes, dont les interventions juridiques et politiques tous azimuts ne sauraient aujourd’hui favoriser la performance de l’action. Et de restaurer une image exemplaire depuis trop longtemps souillée par des abus bureaucratiques non maîtrisés.

Si le Brexit aboutissait à ce résultat, alors il aurait été grandement utile. Il ne nous resterait plus qu’à faire la même chose pour nous soustraire au joug de Paris et de ses tyranniques administrations.