L’Opérationnalité est la condition sine qua non de la réussite du Gouvernement !

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L’Opérationnalité est la condition sine qua non de la réussite du Gouvernement !

Pourquoi les Français ont-ils un si prégnant pressentiment d’échec entre les programmes des gouvernements et leurs résultats ? Pourquoi tout est-il toujours décidé en haut ? Pourquoi ce qui est décidé en haut ne parvient pas à se mettre en œuvre sur le terrain ? Tout simplement parce que « l’opérationnalité » de l’action publique est involontairement rendue impossible par ceux-là mêmes qui la décident ! Les acteurs de terrain sont accablés d’un déluge de modalités qui les empêche d’accomplir ce qu’on leur demande ! Dès la 1ère confrontation au concret, les règles nationales d’application se révèlent inadaptées voire contre-productives. L’impossibilité administrative de faire stérilise et même foudroie immédiatement toute volonté politique réformatrice, y compris la plus élevée. Gaston Defferre avait dû ruser, à l’été 1981, pour rendre irréversible la décentralisation.

Pour éviter au présent Gouvernement de connaître la même infortune que les précédents, une 1ère décision politique s’impose, celle d’adapter immédiatement notre droit administratif aux nécessités pratiques de la mise en œuvre opérationnelle de l’action publique, fondée sur la confiance aux acteurs. La seule manière de conjurer l’idée que tout a été essayé et échoué, est de passer en force à la simplification administrative toujours promise et jamais faite

                          Passer à une « administration rationalisée ! »

  • Élucider l’étrange incapacité à transformer notre système administratif

Le nouveau Premier Ministre Jean Castex s’engage à transformer le fonctionnement de l’Etat. On ne peut que le soutenir. Mais la fin du centralisme bureaucratique de la France a été promise à chaque élection présidentielle et jamais réalisée. C’est donc cette étrange incapacité à transformer notre système qui doit être promptement mise à nu.

  • Constater l’évolution d’un parlementarisme « rationalisé » vers un exécutif « entravé »

En 1958, pour sortie des errements du passé, il a fallu en passer par un Parlement rationalisé. Or, notre fonctionnement étatique actuel ne peut être expliqué sans constater le glissement progressif du Pouvoir. Si le parlementarisme « rationalisé » a montré son efficacité au début de la 5ème République, le déséquilibre originel entre Parlement et Exécutif s’est peu à peu transformé en un nouveau déséquilibre entre Politique et Administration, sous l’influence d’une élite technocratique dominante. Le quinquennat, l’inversement du calendrier, l’hypertrophie du fait majoritaire, ont achevé toute tentative du pouvoir politique de reprendre la main. Le pouvoir s’est trouvé aspiré puis corseté par une camisole juridique d’une complexité asphyxiante, freinant toute initiative qui ne serait pas explicitement prévue par la loi dictée par l’administration.

  • Briser le fonctionnement vertical et hiérarchique dont la Santé est un regrettable exemple

Aucun coup d’Etat n’a été commis. Le pouvoir administratif s’est seulement installé pacifiquement sous les yeux d’un corps politique résigné. L’organisation administrative de la France continue de s’inspirer des principes bureaucratiques hérités du 19ème siècle, les tentatives de réforme se heurtant systématiquement à des résistances sociologiques. Notre système centralisé et hiérarchique conduit à tout concevoir dans une logique descendante, à partir du sommet que constituent les administrations centrales, en cherchant à tout prévoir par des règles absolues, sans possibilité de dérogation. La promesse de « différentiation » est le nouveau leurre pour permettre de ne rien changer.

Le droit produit par le ministère de la santé est lui-même d’une complexité totalement incompatible avec une médecine au meilleur rapport coût-efficacité. Il était évident qu’il n’aurait pas la souplesse et l’adaptabilité nécessaires à une situation d’urgence. Le défi a été relevé grâce à l’héroïsme des soignants qui ont dû s’affranchir du droit abscons, préférant sauver des vies plutôt que décrypter les milliers de pages de réglementation.

  • S’inspirer de la doctrine militaire

 Lors de ses allocutions, le Président de la République a martelé que nous étions « en guerre ». Si le fonctionnement de notre État a pu être inspiré à l’origine de l’organisation militaire, il fort dommage qu’il s’en soit éloigné. La doctrine militaire moderne nous enseigne la conciliation entre autorité, hiérarchie, et opérationnalité. Elle permet au commandement d’organiser son action en fonction de sa finalité, en laissant ouverts plusieurs modes d’action aux exécutants qui doivent faire preuve de discernement, pour faire du « contact avec les réalités » un axiome fondamental.

  • Imposer explicitement une nouvelle doctrine du fonctionnement hiérarchique de l’Etat

La crise a eu le mérite de révéler l’urgence d’une redéfinition du pouvoir hiérarchique au sein de notre système. L’efficacité d’une administration dépend certes de la compétence professionnelle de ses membres, mais tout autant de leur force morale. Et les soignants l’ont montré ! Cette force morale repose sur un double sentiment : l’appartenance à une communauté humaine au service d’un peuple et une responsabilité individuelle et collective.

Les défis lancés par la crise ne seront pas relevés avec un système hiérarchique hypercentralisé et bureaucratique. Ce serait l’échec assuré. L’action publique doit être urgemment libérée, la confiance dans les agents affirmée, la prolifération du droit éradiquée, et le paradigme étatique inversé.

C’est la condition sine qua non  de la réussite du Gouvernement !

C’est à l’évidence le diagnostic du Premier Ministre. Il ne lui reste qu’à imposer, immédiatement et sans délai, les principes forts de droit administratif qui, seuls, peuvent rendre à l’action publique son opérationnalité.

Le Conseil National d’Evaluation des Normes (CNEN) a, depuis plus de 10 ans, ciselé les outils le permettant, il suffit de les utiliser !

 Alain Lambert

Ancien Ministre
Président du CNEN

Par |2021-03-15T17:03:47+01:0016 juillet 2020|Politique|0 commentaire

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